Notre-dame-de-lourde-créateur-francois-partie-01 et 2

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1 R 10 : la reine de Saba


1 R 10 : la reine de Saba

 

1 Rois 9,26 Le roi Salomon construisit une flotte à Eciôn-Guèvèr qui est près d'Eilath, au bord de la mer des Joncs, au pays d'Édom. 27 Hiram envoya sur les navires ses serviteurs, des marins connaissant bien la mer; ils étaient avec les serviteurs de Salomon. 28 Ils parvinrent à Ofir et en rapportèrent de l'or, 420 talents qu'ils amenèrent au roi Salomon.

10,1 La reine de Saba avait entendu parler de la renommée que Salomon devait au nom du SEIGNEUR; elle vint le mettre à l'épreuve par des énigmes. 

2 Elle arriva à Jérusalem avec une suite très imposante, avec des chameaux chargés d'aromates, d'or en grande quantité et de pierres précieuses.

Arrivée chez Salomon, elle lui parla de tout ce qui lui tenait à coeur. 3 Salomon lui donna la réponse à toutes ses questions : aucune question ne fut si obscure que le roi ne pût donner de réponse. 

4 La reine de Saba vit toute la sagesse de Salomon, la maison qu'il avait bâtie, 5 la nourriture de sa table, le logement de ses serviteurs, la qualité de ses domestiques et leurs livrées, ses échansons, les holocaustes qu'il offrait dans la Maison du SEIGNEUR et elle en perdit le souffle.

6 Elle dit au roi : 

« C'était bien la vérité que j'avais entendu dire dans mon pays sur tes paroles et sur ta sagesse. 7 Je n'avais pas cru à ces propos tant que je n'étais pas venue et que je n'avais pas vu de mes yeux ; or voilà qu'on ne m'en avait pas révélé la moitié! Tu surpasses en sagesse et en qualité la réputation dont j'avais entendu parler. 

8 Heureux tes gens, heureux tes serviteurs, eux qui peuvent en permanence rester devant toi et écouter ta sagesse. 

9 Béni soit le SEIGNEUR, ton Dieu, qui a bien voulu te placer sur le trône d'Israël ; c'est parce que le SEIGNEUR aime Israël à jamais qu'il t'a établi roi pour exercer le droit et la justice. » 

10 Elle donna au roi 120 talents d'or, des aromates en très grande quantité, et des pierres précieuses. Il n'arriva plus jamais autant d'aromates qu'en donna la reine de Saba au roi Salomon. 

11 Les navires de Hiram qui avaient transporté l'or d'Ofir avaient aussi rapporté du bois de santal en très grande quantité et des pierres précieuses. 12 Avec ce bois de santal, le roi fit des appuis pour la Maison du SEIGNEUR et la maison du roi, ainsi que des cithares et des harpes pour les chanteurs. Il n'arriva plus jamais de bois de santal, on n'en a plus vu jusqu'à aujourd'hui.

13 Le roi Salomon accorda à la reine de Saba tout ce qu'elle eut envie
de demander, sans compter les cadeaux qu'il lui fit comme seul pouvait en faire le roi Salomon. Puis elle s'en retourna et s'en alla dans son pays, elle et ses serviteurs.

Tout au long de son règne, Salomon est entouré de femmes. Il y a le harem des mille et des trois cent que le Don Juan de Mozart se fera fort de parodier. Toutes anonymes. Anonymes aussi la fille de Pharaon qu’il épouse par calcul politique ou les deux prostituées que sa sagesse départage. Seul est connu le nom de sa mère, la redoutable Bethsabée. Les autres comptent peu, même si elles inclinent, vers la fin, le cœur du monarque vieillissant vers l’idolâtrie. Anonyme elle aussi, la reine de Saba sort néanmoins du lot. Sa visite est un point culminant du récit avant la déliquescence du héros.

À cause d’une rumeur

Salomon a construit et consacré la Maison du Seigneur. Il a construit aussi sa propre maison (reflet de l’autre Maison, celle de Yhwh, le SEIGNEUR) et organisé son royaume. Un monarque voisin, ami de son père David, l’a aidé : Hiram, roi de Tyr. Leurs marins sont encore côte à côte dans l’expédition qui ramène l’or d’Ophir. Et c’est dans le sillage de cet or mythique que le récit introduit la reine de Saba. « La reine de Saba a entendu parler de Salomon à propos du nom de Yhwh. Venant l’éprouver par des énigmes… » (1 R 10, 1).

La riche étrangère se distingue entre toutes. Personne jusqu’à présent n’a mis Salomon à l’épreuve, à part Yhwh au début du règne : « Demande, que veux-tu que je te donne ? ». L’éprouvé, déjà sage, n’avait demandé que la sagesse ; la richesse lui fut donné par surcroît (1 R 3, 1-15). Cette alliance entre un homme et son Dieu, ou plutôt entre un dieu, Yhwh, et un homme étonne et interroge. Pour répondre à cette énigme, la femme prend le truchement d’autres énigmes – dont nous ne connaîtrons rien, le narrateur se contentant de suggérer un dialogue sur pied d’égalité, à cœur ouvert. Les sens de la reine sont en éveil, non seulement l’écoute mais la vue : elle voit tout, l’intelligence et son apparat (la richesse), et l’excès de ce voir la brise : « elle en perd le souffle ». La réalité dépasse la rumeur – la fiction ? – et c’est à souffle perdu qu’elle prend la parole, s’attachant tour à tour à Salomon, à ses serviteurs et au Seigneur.


La reine parle d'abord au roi. La païenne au fils d'Israël. Elle vient du dehors et elle va repartir. Sa parole, au centre du récit, cristallise la rencontre de la sagesse des nations et de la sagesse d’Israël. Bien sûr, le narrateur fait s’incliner la première devant la seconde. Encore ne le fait-il qu’après avoir pris soin de dire qu’elles ont dialogué. La rencontre n’est pas fusion. Elle est échange. Salomon en gardera des parfums inoubliables et la reine des cadeaux somptueux mais mystérieux (pour nous) – à la mesure des énigmes initiales et de la grâce de la rencontre. Mais voilà que l’or d’Ophir réapparaît, et la flotte d’Hiram et les travaux d’embellissement. Le quotidien, suspendu pour un temps, reprend ses droits. Salomon à encore à faire.

Le temps de la rencontre a posé des éléments qui reviendront plus loin dans le livre, chez les prophètes, dans les psaumes ou les narrations évangéliques. En regardant Salomon, la reine introduit ainsi le motif du croire et du voir ; il faudra attendre la fin de l’évangile de Jean pour passer au croire sans voir. 

Puis la reine se tourne vers les serviteurs. Une béatitude monte de ses lèvres ; il y a là hommage indirect au maître et au dieu de ce maître comme, dans le Ps 1 (la béatitude sur l’homme « qui murmure la Loi nuit et jour »), est un hommage à la Loi et à Celui qui la promulgue. La béatitude est reconnaissance d’un bonheur qui échappe ; on la dit sur quelqu’un d’autre alors qu’on aimerait tant la dire sur soi-même. 

Enfin la reine porte son regard vers celui dont le nom avait déclanché la visite : Yhwh, le Seigneur. Non qu'elle le voit, mais elle le devine à travers la sagesse et la richesse données au roi d'Israël. Reconnaissance d’une puissance et d’un amour d’élection, non pour un homme, mais pour un peuple. Les deux derniers mots sonnent comme le rappel d’une mission reçue : « droit et justice », mots dont le prophète Isaïe parera – en vain - l’Emmanuel.

La reine de Saba fixe, dans ses mots, un âge d’or dont la suite de l’histoire va ternir l’éclat. Salomon oublie la mission reçue et Celui dont il l’a reçu ; la béatitude s’estompe avec l’opposition des Hadad, Rezôn ou Jéroboam (1 R 11, 14-40). Le discours de l’étrangère, en son temps, ne se voulait pas jugement. Il le devient.




La visite de la reine est un point culminant de l'histoire de Salomon


la reine de Saba part 1




05/02/2011
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